00-
Cil
PAR 1,3
Rev. Henry E. Benoit*
BR
74-6
Arec Introduction parle
Rcv. H. M. M. Hackctt. M, A*, D.CL
Mi3S M.o.Cassels.
P'REniERE Liste de Souscriptions
A
C' Eglise Jfndlicane avant U Reforme,
PAR LE
REY. HENRY E. BENOIT,
Recteur de lEglise du Rédempteur.
1. M. B. H. Collins, Angleterre.
2. :\I. T. Kent, Londres. Ont.
3. Macl. J. Binga}^ Yarmouth, X. S.
4- M. H. Robertsou, Owen vSound, Ont.
5. :\relle. F. Crtidda.s, Angleterre.
6. Melle. A. Fairless, Angleterre.
7. Melle. Fitzpatrick, Angleterre.
!^. M. John Bradford. Granby, Que.
9- M. A. H. Catnpball. Toronto, Ont.
10. M. P. \V. D. Broderick, Toronto, Ont.
11. M. John Blaiklock, Toronto, Ont.
12. Mad. Bowsrs, Bedford, Que.
13. Mad. C. L. Moody, Varnioath, X. S.
14. Mad. Brown, Yarmouth, X'. S.
15- M. Chas. Cockshutt, Toronto, Ont.
16. M. Arthur Ahern, Québec.
17. Mad. Dunlop, Peterboro, Ont.
iS. M. C. H. Haie, Orillia, Ontario.
19. M. W. H. Worden, Toronto, Ont.
20 M. John Labatt, Londres, Ont.
■21. M. G. E. Loud, Farnhara. Ont.
22. :\L W. H. Robinson, Granby, Que.
23. C. J. James, Pasteur, Toronto, Ont.
24. Melles. Majors, St. John, X. B.
25. Melle. Dykes, Galt. Ont.
26. M. D. F. Matthew, Walkerville, Ont.
Digitized by the Internet Archive
in 2010 with funding from
University of Toronto
http://www.archive.org/details/lgliseanglicanOObeno
L'EGLISE ANGLICANE
AVANT LA REFORME
(Abrège D'Histoire Ecclésiastique)
EN TROIS PARTIES
PAR LE
REV. HENRY E. BENOIT,
Recteur de L' Eglise du Rcde^npteur^ - Montréal,
Avec Introduction par le
REV. H. M. M. HACKETT, M. A., D.C.L ,
Prvîcipal du Collège Diocésain de Montréal.
Examinez toutes choses ; retenez ce qui est bon.
— Thess. K, 21.
MONTREAL, - CANAI)\,
*I*»H*" 4fHtH^ •i*4t4» •4t»l«H" •l»?l*i<^ «ItHtH» »l*4«l' "4tH'4' 4*4^4^ 4t4»4' <lt4Tft^4«4^Hn
INTRODUCTION.
Mon excellent ami, le Rev. Mr. H. E. Benoit,
l'auteur de L'Eglisk Anglicane avant la Reforme,
m'a prié d'écrire quelques mots d'introduction pour
expliquer le but de cette brochure ei en recommander la
lecture ; c'est avec le plus grand plaisir que j'acquiesce à
sa demande.
Qui ne désire connaître la vérité? Qui ne se plaint
que la vérité est difficile à trouver ? Il est évidemment du
devoir de ceux qui l'ont trouvée de la faire connaître à
ceux qui ont failli dans la recherche de cette vérité.
Au mois de Janvier 1900, à l'ouverture d'une mis-
sion pour la conversion des Protestants, l'Archevêque
Bruchési loua chaleureusement les efforts tentés à l'église
St. Patrice pour ramener à la vérité ceux qui étaient éga-
rés. Le digne Archevêque avait raison ; il n'y a pas de
plus grand devoir, de plus grand privilège que celui d'en-
seigner et de prêcher. Mgr. Bruchcsi ayant eu la bonté
d'inviter les Protestants à assister aux réunions de cette
mission, et même de solliciter les Catholiques romains à
INTRODUCTION.
faire des efforts pour amener leurs concitoyens à ces assem-
blées, je ne puis faire mieux que de suivre son exemple.
J'engage donc les Catholiques romains à lire ce livre, et je
demande aux Protestants de faire tout en leur pouvoir
pour le faire connaître.
L'auteur raconte dans un exposé lucide et conforme
aux Ecritures la fondation de l'Eglise de notre Seigneur
Jésus-Christ, et définit, dans les termes même de la Bible,
la signification du mot " Eglise ". Ces choses que chacun
peut lire dans les Saintes Ecritures ne donnent lieu à
aucun doute. Mais l'auteur rend encore un plus grand
ser\-ice à la cause de la vérité. Ne se bornant pas à
constater avec regret toutes les fausses notions qui
existent sur l'origine et riiisloire de l'Eglise anglicane,
il les rectifie victorieusement. Ses assertions ne sont
pas celles ex-parte d'un partisan, mais des faits stricte-
ment historiques. L'auteur, avec impartialité, cite
également les théologiens catholiques romains et pro-
testants, et si l'exactitude d'une de ses affirmations pouvait
être mise en doute, il est prêt à en fournir des preuves
irréfutables. Personne ne doit hésiter à lire ce livre, car
il n'y a rien qui puisse blesser les susceptibilités.
L'auteur raisonne, il n'injurie pas. Il espère que
tous seront bientôt comme lui dans la glorieuse liberté des
enfants de Dieu. Il n'insulte pas ceux qui sont nés sous
le joug de l'esclavage ; mais c'est avec amour qu'il cher-
INTRODUCTION
elle à conduire à la lumière de la vérité ceux qui sont
dans les ténèbres de l'erreur.
Il existe une ancienne prière de l'Eglise Catholique
appelée la prière de Saint Chrysostôme. Cette prière est
vieille ; elle est belle. Elle est addressée au Rédempteur
du monde. "Lumière de Lumière, vrai Dieu de vrai Dieu."
Cette prière contient une magnifique demande, c'est celle
que je fais pour tous ceux qui liront ce livre :
"Accorde nous dans ce monde la connaissance de
la vérité, et au siècle à venir la vie éternelle "
H. M. M. HACKETT.
Montréal, Que.
Jour de vSaint Augustin 190^3.
L'EGLISE AHGLICASE AYANT LA REFORME.
PREMIERE PARTIE.
CHAPITRE I.
L'EGLISE ANGLICANE : Que de personnes
se servent de cette expression sans en
comprendre toute la signification ! Quelle est
cette Eglise, et à quelle époque remonte-t-elle?
Comment peut-elle justifier son nom et sa place
dans l'histoire des peuples?
Que d'erreurs sont lépandues dans le
monde au sujet de l'Eglise anglicane I A'eut-on,
par exemple, s'enquérir de la date de son organi-
sation ? Les uns répondent qu'elle doit sa fonda- Fausses
tion à un acte du Parlement anglais; d'autres, ^otiofis.
en plus grand nombre, afi&rmeront que cette Eglise
commença avec Henri VIII ; qu'elle n'est qu'un
des multiples fruits de la Réforme du XATième
siècle; que c'est l'Eglise des riches et de la noblesse
seulement ; que ses pasteuis sont pa^'és par
l'Etat; qu'elle n'est qu'une branche de l'Eglise
romaine; qu'enfin, telle que cette dernière, elle a
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
retardé, au lieu d'avancer, le développement moral
et intellectuel des peuples. Xous nous proposons,
dans ce qui va suivre, de démontrer la fausseté de
toutes ces assertions.
L'Eglise anglicane existait déjà depuis plu-
sieurs siècles quand, pour la première fois, le mot
"Parlement " fut introduit dans la langue anglaise.
La monarchie n'était pas encore fondée en An-
Otgani- gleterre que déjà l'Eglise anglicane était une
TÈ^Use^ institution florissante. C'est dire que cette Eglise
est la plus ancienne des institutions qui virent le
jour dans les Iles Britanniques. D'ailleurs, c'est
elle qui a toujours joué le plus grand rôle dans le
relèvement moral des peuples qui l'habitent. Ce
n'est donc pas au sein de la Réformation qu'il
faut placer le berceau de l'Eglise anglicane,
nous devons remonter au temps des premiers
apôtres de Jésus-Christ.
Comprenons, d'abord, ce que veut dire ce mot
" L'Eglise ". L'Eglise est le corps mystique de
Jésus- Christ (Col. 1-24), auquel les chrétiens sont
unis par leur baptême ( Actes 1 1-41 ), et dans le-
ÇfJ^^y^^ quel ils sont nourris par les movens de grâce dési-
* gnés par Jésus-Christ lui-même (Actes 11-42,
VIII 14-37, XIX-5-7)- C^s moyens de grâce
sont administrés par des personnes dûment auto-
10
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
risées par les évêques qui sont les successeurs des
apôtres (Tite I. 5). Jésus-Christ vint sur cette
terre pour établir une église (Matt. XVI 18).
Il choisit douze Apôtres pour en être les pierres
fondamentales, lui-même devant en être exclusi-
vement la pierre d'angle ( Eph. 11 20). Christ
donna aux Apôtres la mission d'enseigner et
de baptiser les nations (Matt. XXVIII. 19-20 ),
et les Epitres nous montrent clairement comment
ils remplirent cette mission. Vers l'an 30, après ^fjf^'''^'
avc)ir entendu la prédication de St. Pierre, 3000 Voj'a^-es
personnes se convertissent et sont ajoutées à l'E- ^^ p^^^i
glise par la cérémonie du baptême ( Actes 1 1-41 ).
Plus tard, St. Paul se convertit (Actes IX 18-20),
et devient un des plus fidèles serviteurs du Christ.
Cet Apôtre fit plusieurs voyages missionnaires.
Il visita l'Arabie, l'Asie-Miiieure, l'Espagne et la
Gaule. Plusieurs historiens, dès le premier siècle
du Christianisme, affirment que St. Paul se rendit
en Angleterre, ce que très probablement il fit afin
d'aider à l'établissement du Christianisme dans
ces contrées lointaines.
En l'an 44 des Presbyteri, ou anciens, sont
établis dans chaque Eglise (Actes XIV 23),
comme l'avaient déjà été les diacres qu'on avait
choisis et mis à part par l'imposition des mains
II
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
( Actes VI ), et St. Paul, à Ephèse, charge Timo-
thée d'ordonuer des prêtres et de les établir dans
les Eglises ( I Tim. V-22 ).
Les Eglises étant devenues trop nombreuses
^ ,. pour que les Apôtres pussent les surveiller toutes,
i'on des il^ établirent des nommes capables de leur aider
Evêqiies ( Tite 1-5-10 ). Ainsi du temps de St. Paul, et
et des
Diacres, longtemps avant la mort de St. Jean, les Eglises
étaient administrées par les évêques, assistés de
prêtres et de diacres. Cette division en trois ordres
du ministériel apostolique a toujours subsisté.
tant dans l'ancienne Eglise bretonne que dans
l'Eglise anglicane de nos jours.
Un siècle à peine après la mort de St. Jean
les chrétiens pouvaient déjà dire: "Nous ne
, sommes que d'hier, et déjà nous remplissons vos
de villes, vos municipes, les places publiques, le
r Eglise, palais, le forum. Dans les champs, dans les îles,
dans les forteresses, on ne rencontre que chré-
tiens ; gens de tout âge, de tout sexe, de toutes
conditions et de toutes dignités s'affilient au
Christianisme."
En l'an 43, A.D., l'empereur Claude, accom-
Invasion pagné d'une flotte de 800 vaisseaux de guerre,
Romaine débarque à Ebsfleet et commence une guerre qui,
12
L'BGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
ayant duré 40 ans^ se termine enfin par la sou-
mission de la Grande Bretagne et son occupation ^/^/^^^"^^
par les armées romaines durant plus de trois César.
siècles. La religion des anciens Bretons était celle
des Druides. Ils avaient le plus grand respect
pour les essences forestières, notamment le chêne.
Ils offraient leurs sacrifices au fond des bois, dans
des lieux obscurs, parmi ces rois de la forêt dont ^^^^^^^
la hauteur des cimes et la majesté du tronc ins- anciens
piraient tant d'effroi au peuple. Les prêtres ^^^'^■^'
Druides exerçaient la plus grande influence sur
les événements les plus courants de la vie, et leurs
paroles étaient regardées comme des oracles.
Le langage des Bretons était le Celtique,
langue commune à certains peuples de la Gaule.
Les Romains introduisirent le latin, l'anglo-
saxon fut apporté par les nations germaniques, j^ano-a^e
puis l'allemand et le français par les conquêtes des
des Danois et des Normands. C'est de la fusion ''^ ^^^^'
de ces cinq idiomes que nous avons obtenu la
langue anglaise.
13
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
L
CHAPITRE II.
L'Eglise dans la Grande Bretagne.
'EGLISE CHRETIENNE dans les Iles Bri-
tanniques doit son origine à trois sources
distinctes. Premièrement, à l'ancienne
Eglise bretonne ; deuxièmement, à la mission
d'Augustin ; troisièmement, aux missionaires
2-na^es ^'Ecosse et d'Irlande. Nous ne saurions dire
d'ancie?is positivement par qui le Christianisme fut intro-
f/d^êa-t' ^^^^ ^" Angleterre. Selon l'histoiien Théodoret,
vains St. Paul fut un des Apôtres qui porta le salut aux
vwdernes j^^^ ^^ l'Océan." Au nombre <ie ceux qui sont
d'avis que St. Paul fut un des apôtres qui
vinrent évangéliser les Bretons sont les évêques
Stillingfleet, Burgess, Uslier, Gibson et Nelson.
Gildas. le sage historien breton du commence-
ment du Vlième siècle, dit que le Christianisme
fut introduit dans les Iles Britanniques en l'an 6i
après Jésus-Christ. St. Clément de Rome, com-
pagnon intime de St. Paul ( Phil. IV. 3 ), dit
qu'en prêchant l'Evangile, St. Paul se rendit aux
extrémités de l' Ouest. Par cette dernière expres-
sion l'on entendait l'Espagne, la Gaule et les Iles
14
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Britanniques. D'antres historiens affirment que
les premiers rites chrétiens furent pratiqués à
Glastonbury par Joseph d'Arimathée et ses douze y ^^^o^^'
compagnons. Ce que nous pouvons affirmer c'est
qu'il y avait en l'an 300 une Eglise à Glastonbury
dont, au dire d'un ancien historien, Aristobulus,
qui mourut en 99, fut le premier évêque. D'après
le témoignage universel des premiers historiens
chrétiens, les habitants de la Grande Bretagne Londres.
avaient été soumis à l'Evangile avant la fin du
deuxième siècle, et il y avait un évêque à Londres
en l'an 180. St. iVthanase mentionne les Bretons
au nombre de ceux qui avaient accepté la foi. .^^ .
Vers l'an 200, Tertullien écrivait: "Christ est /zV;/.
prêché aux Barbares et règne sur des peuples que
les Romains n'ont pu soumettre, dans les parties
les plus éloignées de l'Espagne et de la Gaule
ainsi que dans les Iles Britanniques." Au qua-
trième siècle Eusèbe affirme que quelques-uns ^J/ï*:^^ ^^
des apôtres traversèrent les mers et vinrent dans
les Iles Britanniques, C'est à St. Paul que St.
Jérôme attribue cette mission accomplie par lui
après sa mise en liberté (61 A. D.). Ces témoi-
gnages semblent indiquer que le christianisme
s'introduisit en Angleterre du vivant même des
Apôtres.
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Sous l'empereur Dioclétien, l'Eglise bretonne
Persccu- fQ^mit plusieurs martyrs. Dans la ville de
il07lS. ^
Caerlon-sur-Usk, Arron et Julius furent mis à
mort. Toutefois c'est St. Alban qui est reconnu
comme le premier martyr de l'Eglise bretonne.
Pour échapper à ses persécuteurs, un prêtre
St. Alban s'était réfugié dans la maison d'Alban, noble pa-
tricien romain alors vivant en Angleterre. La
vie tissée de piété et d'humilité du saint prêtre
fit une telle impression sur Alban qu'il demanda
à être baptisé. Les persécuteurs ayant découvert
où le prêtre chrétien s'était réfugié, Alban lui
permit de s'échapper une seconde fois, en changeant
d'habits avec lui et alla ensuite se constituer
prisonnier. Questionné par les juges, Alban se
déclara chrétien. A^'ant refusé de sacrifier aux
divinités païennes, il fut condamné à m.ort. Té-
moin du courage et de la foi du martyr, le soldat
choisi pour l'exécution laissa tomber son épée,
déclarant qu' il acceptait lui-même la foi chrél ienne.
Il fut immédiatement traduit en justice et,
ainsi qu' Alban, souffrit le martyre le 22 Juin 304,
près de 300 ans avant la venue d'Augustin en
Angleterre. K. l'endroit même oii périrent ces
deux chrétiens, l'empereur Constantin fit bâtir
une église pour perpétuer la mémoire de St. Alban,
16
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME. '
Cette église se trouve encore aujourd'hui dans la
ville de St. x\lban à 30 miles de la ville de
Londres.
En l'an 314 eut lieu le concile d'Arles. Trois
évêques bretons, Restitutus de Londres, Euborius d'Arles,
d'York et Adelphius de Lincoln, se rendirent à ce de 2sicée
et d'' Avt-
concile, accompagnés chacun d'un prêtre et d'un
jmmuni.
diacre. Les conciles de Nicée (325) et de Rimini
(359) rassemblèrent un nombre encore plus grand
d'évêques bretons. Nous vo3'ons donc que dès
le déclin du Illième siècle de notre ère, le Chris-
tianisme était déjà fermement établi dans la
Grande-Bretagne et que l'Eglise était gouvernée
par des évêques, des prêtres et des diacres, et que
l'évêque de Rome n'avait aucune autorité sur elle.
Sous le règne d'Honorius, les Bretons avaient
déjà secoué le joug de Rome. Mais, se vo3'ant
menacés par les Pietés et les Scots, ils eurent re-
cours, pour repousser ces barbares, à Tinter^'ention A?igIo-
des Saxons et des Angles, deux peuples féroces '^-'^^ns.
et païens. Les Anglo-Saxons s'établirent dans la
Grande-Bretagne, et après avoir vaincu les Pietés
et les Scots, réduisirent ceux qui les avaient
appelés. Ceux qui purent échapper à la persé-
cution des païens se dirigèrent vers l'ouest dans
la Cornouaille, le pays de Galles et le Cumberland.
17
07'igine
des
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
C'est pour cette raison qu'à partir de l'année 449
les annales de l'église chrétienne ne font mention
que de ces parties en Angleterre. Le Christia-
nisme avait pour ainsi dire disparu des lieux où
il avait été primitivement établi
^J^^
~W^
18
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
CHAPITRE III.
Missionnaires.
TL serait impossiVjle, dans le cadre restreint de
cet essai, de mentionner tous les mission-
naires qui, pendant les premiers siècles, vinrent
dans la Grande-Bretagne. Xons nous bornerons
seulement à citer le nom des principaux. Remar.
quons, en passant, que ce n'est pas à Rome seule
que l'Angleterre doit sa conversion ; cet lionneur
appartient aussi aux missionnaires qui vii:rent de
l'Ecosse, de l'Irlande et de la Gaule méridionale.
Vers la fin du quatrième siècle, Xinj-as ou Xinian, _ .
fils d'un prince Breton, avait été envoyé (384 AD.) ^;^'/
pour évangéliser les païens du nord de la Bretagne
Il s'établit en Ecosse où il fut évêque, et mourut
en 432, au moins 165 ans avant la mission
d'Augustin. " Nous savons, d'autre part, " dit
l'historien Chastel," que l'Eglise bretonne, jusqu'à
la conquête des Anglo-Saxons, repoussa le rite
romain et l'autorité papale. "
Un des premiers missionnaires fut St. Colom-
ban. Il naquit en Irlande, et fut instruit
19
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
l mb' t ^^ monastèie de Clonard. Vers l'an 564, alors
qu'il avait trente ans, Colomban passa dans
la Grande Bretagne et s'établit dans une île
appartenant à l'Ecosse où il fonda le célèbre
monastère d'Iona. Les rois d'Ecosse et d'Irlande,
pendant plusieurs siècles, vinrent dans cette
île pour y être couronnés par St. Colomban et
ses successeurs. La pieire sur laquelle ces princes
s'assej'aient pour leur couronnement est actuel-
lement placée sous le trône de l'abbaye de West-
minster, et sert encore aujourd'hui au souverains
anglais dans une occasion semblable.
CONVERSION DES ANGLO-SAXONS.
Grégoire, plus tard surnommé le Grand, mais
alors simple diacre, se promenant un jour par le
marché de Rome, vit des petits garçons qu'un Juif
mettait en vente. Frappé, tant par leur chevelure
Gi'ègoire blonde que par la beauté et la blancheur de leur
Grand. visage, Grégoire s'informa de leur pays et de leur
religion. " Ils sont Angles, mais idolâtres, "
lui répondit-on. "Ils ne seraient pas des Angles,
mais des anges, s'ils étaient chrétiens, " répliqua
Grégoire. Une fois évêque de Rome. Grégoire
résolut d'envoj'er des missionnaires en Angleterre.
Il choisit pour chef de cette mission Augustin
20
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME
prieur du monastère de St. André. Les mis-
sionnaires, au nombre de 40, arrivèrent à
Ebsfleet le 23 Juillet 597. Ethelbert, roi des ^^'^^'^^^^^
Angles et des Saxons, avait épousé une chré-
tienne, Berthe, fille de Charibert, roi des
Francs. Ethelbert, quoique païen lui-même,
favorisa la mission d'Augustin. Il ordonna aux
missionnaires de demeurer dans l'Ile de Tanet
jusqu'à ce qu'une décision fut prise à leur sujet.
Un certain jour Ethelbert manda Augustin et
ses compagnons; qu'il voulut recevoir en plein
air, craignant quelqu'opération magique. Les
missionnaires vinrent en procession, portant
une croix d'argent et l'im.age peinte du Sauveur
crucifié, et demandant à Dieu, dans des litanies com-
munes, leur salut et celui du peuple qu'ils étaient
venus évangéliser. Ethelbert. assis avec ses nobles
sous les branches d'un grand chêne, permit aux
missionnaires de s'asseoir. Augustin, au moyen
d'un interprète, leur annonça la bonne nouvelle
du salut. Toutefois, le roi ne voulut se compro-
mettre en aucune manière. Il les autorisa à
poursuivre leur œuvre et à baptiser ceux qu'ils
pourraient persuader, et leur donna asile à
Doroverne, antique capitale, aujourd'hui connue
sous le nom de Cantorbéry.
21
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
PrèsdeCaiitorbéry se trouve une petite église
Si. Mar ^^j depuis plus de treize siècles porte le nom
Tours. de St. Martin de Tours. C'est dans cette église
que la pieuse Berthe adorait son Dieu. Les niis-
siDunaires romains s'y établirent, se livrant con-
tinuellement à la prière et prêchant la parole de
vie à tous ceux qui venaient l'entendre. Tou-
Conver- q\x^^ de la vie simple des missionnaires et de la
sion du '^ .
roi douceur de leur doctrine, une foule de païens
Ethelbert ^ç. ^^^wX. baptiser. Le roi Ethelbert, après mûre
réflexion, accepta la foi chrétienne, entraînant
avec lui nombre de ses sujets. Il fut baptisé
le 7 juin 597. Après la conversion du roi. le
nombre de ceux qui venaient aux instructions
s'accrut tellement de jour en jour qu'Ethelbert
fit don d'un emplacement convenable pour y bâtir
une cathédrale et de biens suffisants pour son en-
tretien.
C'est à cette époque que mourut St. Colomban,
, , , , le plus noble de tous les missionnaires qui soient
St. Co- jamais venus dans la Grande Bretagne. Il laissa
lombaji. assez de disciples pour continuer, en Irlande et en
Ecosse, l'œuvre qu'il avait si heureusement
commencée.
Augustin était passé en France pour être
consacré archevêque des Anglais par Vergile, ar-
22
l'eglisp: anglicane avant la reforme.
chevêque d'Arles, et Etherices, évêqiie de Lyon.
A son retour en Angleterre il baptisa plus de lo.ooc
Anglais le jour de Noël 597.
Augustin écrivit ensuite à Grégoire le Grand
au sujet des évêques bretons qui, comme nous
l'avons vu, s'étaient réfugiés dans les provinces
de Galles et de Cornouaille. Grégoire répondit
qu'ils devaient tous se soumettre à Augustin; que
si, dans quelqu'église que ce soit, romaine, bre-
tonne ou autre, il trouvait quelque coutume qui
fût plus agréable à Dieu, il devait l'introduire
dans la nouvelle église des Anglais. C'est ce que
fit Augustin, prouvant clairement que l'église
anglaise était indépendante de celle de Rome-
Toutefois les évêques bretons ne \'oulurent pas
accepter Augustin pour leur archevêque, et reje-
tèrent les suggestions de l'évêque de Rome. L,e
roi Ethelbert convoqua alors un concile à Angus-
téueizat en l'an 602.
Sept évêques bretons vinrent à ce concile „ .,
^ ^ ^ Conaie
accompagnés de plusieurs savants de Brancor, D'augus-
monastère de grande réputation auquel Dunot ^<?'''<^^^^^-
était attaché comme abbé. Ce monastère était
divisé en sept parties dont la moindre comptait
plus de 300 moines. Avant de se rendre au concile,
23
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
les évêques bretons allèrent consulter un ana-
chorète qui s'était acquis une réputation de sa-
gesse et de sainteté, et lui demandèrent s'ils
devaient abandonner leurs anciennes traditions
pour suivre Augustin. L'anachorète répondit :
' 'Si cet Augustin est un homme de Dieu, suivez-le.
S'il vient à votre rencontre quand vous arriverez
au concile, sachez que c'est un serviteur de Jésus-
Christ. S'il ne se lève pas pour vous recevoir,
méprisez-le, comme il vous aura méprisé." Arri-
vés au concile, les évêques bretons trouvèrent Au-
gustin assis. Ils jugèrent alors qu'il était or-
gueilleux et refusèrent de l'accepter pour
archevêque. Dunot, parlant en leur nom,
dit "Qu'ils ne sauraient reconnaître à l'évêque
de Rome aucune suprématie sur les églises puisque
dès le commencement tous les évêques étaient
égaux. Sur le point de se séparer, Augustin
dit, "Puisque vous n'avez pas voulu la paix
avec des frères, vous aurez la guerre avec des
ennemis. " Cette prophétie s'accomplit quand
Edilfrid, roi de Xorthumber, s'empara de la ville
de Chester, et fit mourir près de douze cents
moines du monastère de Brancor.
Dés l'an 604, Augustin avait consacré deux
évêques, Mellit et Juste. Mellit s'établit à Londres
24
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME,
où il convertit Sigebert, roi des Saxons Orientaux. ^^^^^ ^^
Sur l'ancien emplacement d'un temple dédié à la Sigebert.
déesse Diane, Sigebert fit bâtir l'église de l'apôtre
St. Paul qui devait devenir la Cathédrale de Lon-
dres. Juste fut évêquede Rochester, dans la pro-
vince de Kent, Ethelbert y fit bâtir l'église de
St. André et lui donna de grands biens comme il
avait fait pour l'église de Cantorbéry. De plus il fit
passer des lois par son conseil afin d'assurer aux
églises la possession de ces biens.
Ayant consacré Laurent comme son succes-
seur, Augustin mourut le 26 mai 606. Il fut
enterré à Cantorbéry, près de l'église de St. Pierre
et St. Paul qui n'était pas encore achevée.
Augustin avait fait revivre le Christianisme en
Angleterre, converti une multitude d'âmes dans
le royaume de Kent, et fondé des églises à Londres
et à Rochester.
"'0
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA RZF0R:^E.
DEUXIEME PARTIE.
CHAPITRE IV.
Conversion du Roi de Xorthumber.
EDWIX, roi de Xorthumber, avait épousé
Edelburge. sœur d'Ethelbald, roi de Kent.
Cette princesse obtint la conversion du roi son
époux et de ses sujets. Avant d'être baptisé,
Edwin assem]:)la les membres de son conseil, et
leur demanda ce qu'ils pensaient de la nouvelle
foi. Un de ceux qui étaient présents répondit :
" O roi, la vie présente me parait semblable à
un petit oiseau qui passerait l'hiver dans une
salle OTi r on fait bonne chère auprès d'un grand feu.
Cet oiseau, en volant d'une porte à l'autre, se
réchauffe un moment à l'air de la salle et dispa-
raît à la vue. Il en est ainsi de la vie humaine,
et nous ne savons ni ce qui la précède ni ce qui la
suit. Si cette nouvelle doctrine nous en apprend
quelque chose de plus certain, il est rai.sonnable
26
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
de la suivre." L'évêque Paulin, qui avait été
convoqué pour la circon>tance, fit connaître sa
mi-ssion. et le roi E Iwin ayant déclaré publique-
ment qu'il renonçait à l'idolâtrie pour accepter la ^^^^
foi en Jésus-Christ, fut baptisé ainsi que toute la
noblesse et une bonne partie du peuple, le i r
avril 627, dans une église de bois qu'il avait fait
bâtir pour la circonstance. L- roi établit Paulin
dans la ville d'York, où. nous savons qu'un grand
nombre de personnes vinrent entendre la prédi-
cation, et recevoir le baptême des mains du saint
évêque.
Le roi Edwin, qui était rempli de zélé attira
, . . . St. Félix
à la foi chrétienne les anglais orientaux et leur
roi, Carpuald. Honorins, alors archevêque
de Cantorbéry, leur envoya l'évêque Félix
qui convertit toute la province et établit son
siège épiscopal dans la ville de Dumroc.
D'un autre coté St. Paulin étendit ses travaux
missionnaires, jusque dans la province de Lindici
et convertit le Gouverneur de Lincoln.
Au cours de cette période d'accroissement et
d'extension de l'église, Edwin fut tué et son armée
anéantie par Penda, loi des Merciens. Cette
victoire faillit amener la ruine de l'Esrlise de ,, ^
Mort
Nortnumber. St. Paulm, accompagne de la leine d' Edwin.
27
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
wald.
Edelburge, dut s'enfuir dans le royaume de Kent,
où il reçut la charge de l'Eglise de Rochester.
liy^^ Cependant le diacre Jacques était resté à
York, instruisant et baptisant, léguant ainsi à la
postérité le souvenir d'un courage, d'un zèle, et
d'une probité qui demeureront ineffaçables dans
les annales de l' Eglise anglicane. Oswald, surnom-
St. Os- mé le Saint, le nouveau roi de Xorthumber, voulut
rétablir le Christianisme si rudement ébranlé par
Penda. Il s'adressa aux anciens du monastère
d'Iona. Ces moines Ecossais ayant tenu conseil
résolurent d'envoyer un des leurs. Ils choisirent
pour cette mission Aidan, jeune prêtre que
St. Ai- l'Eglise romaine a mis au rang de ses évêques
canonisés, quoiqu'il n'eût jamais eu l'autorisation
du Pape. Aidan établit son siège épiscopal à
Lindisfarn, surnommée depuis l'Ile Sainte.
Le roi Oswald servait presque toujours d'inter-
prète au saint évêque, et était pour son peuple un
salutaire exemple. Partout où l'on bâtissait des
églises, le roi accordait des subsides pour subvenir
à leur entretien.
St. Aidan, tout le premier, pratiquait ce qu'il
enseignait. Détaché de tous les biens de ce
monde, il allait ordinairement à pied, arrêtant
ceux qu'il rencontrait, pauvres ou riches, pour
28
dan.
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
faire naître la foi chez ceux qui ne l'avaient pas
et la fortifier chez ceux qui, par l'aumône et les
bonnes oeuvres, méritaient quelque peu le titre
de chrétien. Il exigeait de tous ceux qui l'accom-
pagnaient une application journalière à la lecture
des Ecritures et à l'étude des Psaumes. Oswald,
quoique roi très puissant, profita si bien des
instructions de St. Aidan, qu'il devint humble
et doux pour les pauvres, et très libéral envers
toutes les institutions de charité. Aussi le chris-
tianisme fit-il de grands progrès dans tout le
royaume de Xorthumber.
Un autre champ missionnaire s'ouvrit dans
Ouessex parmi les Sav.ons occidentaux, L'évê- St.Biyin.
que Birin s'y établit en 634. Après la con-
version du roi Ginégile, Dorchester devint le siège
épiscopal de ce pays. C'est de Dorchester que
sont sortis les diocèses de Winchester, de Lincoln,
et d'Oxford. St. Birin établit des églises dans
toutes les villes de son immense diocèse.
En l'an 653. quatre prêtres, Cedde, Adda,
Betti et Diuma s'établirent dans la province des
Middle Angles. Les trois premiers étaient du "'^'^^•
royaurae'de Northumber; Diuma venait d'Irlande.
C'est de cette mission que date la fondation de la
Cathédrale de Litchfield. Diuma fut consacré ■ ^
?9
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
évêque des Middle Angles et des Merciens en
l'an 656.
St. 0--wald eut pour successeur son frère
Oswin. Xe pouvant plus supporter les injures
de Penda qui. bien qu'avancé en âge restait
toujours l'ennemi implacable des chrétiens, Cswin
fit vœu de consacrer au service de Dieu sa fille
Elfred s'il obtenait la victoire sur les païens.
Bataille C'est le 15 novembre 625 qu'eut lieu la bataille
fjr. ., de Winwidfield. Oswin battit l'armée païenne
field. trente fois supérieure en nombre. Penda fut tué,
et sa mort marqua la chute du paganisme.
St. Aidan mourut le 20 août 651. Le même
jour St. Cuthbert, prêtre aussi éminent par son
bert. savoir que par ses vertus chrétiennes, fut admis à
l'Abbaye de Maiiros II bâtit un monastère à
Répon. auquel il travailla de ses propres mains plus
que tous ses frères. St. Cuthbert fut très popu-
laire dans le Nord de l'Angleterre où il fit de
nombreux voj'ages missionnaires. Sa réputation
de sainteté fut si grande, qu'en dépit de sa vieil-
lesse, il fut nommé évêque de Lindisfarn et mou-
rut enfin à Maiiros le 20 mars 687. Il fut enterré
d'abord à Lindisfarn, mais plus tard sa dépouille
mortelle fut déposée à Durham.
;o
L'EGLTvSE AXGLICANE AVANT LA REFORME.
Nous ne saurions terminer cette partie de
notre étude sans faire mention de St. W'ilfrid,
autre missionnaire distingué. Wilfrid naquit
dans le royaume de Xorthumber en l'an 634. A r^'^^
l'âge de 14 ans, il fut admis au monastère de
Lindisfarn. Ccmme il désirait être ordonné
par un soi-disant successeur de St. Pierre, il se
rendit à Rome en l'an 653. accompagné de Biscop,
surnommé Benoit, jeune homme appartenant à la
noblesse de Northumber. Après avoir reçu l'im-
position des mains et la bénédiction papale, Wil-
frid revint en Angleterre et s'établit à Répon,
préférant cette ville à tout autre. Dans une con-
férence tenue au monastère de Stréneshal, dont
Hilde était Abbesse en 664, Wilfrid, montrant
plus de zèle que de discrétion, abolit les usages
particuliers à l'église bretonne, et établit la cou-
tume et la pâque romaines. Il gagna le roi
Oswin qui, lui au.ssi. abandonna les pratiques de
Lindisfarn. La même année (664) Wilfrid se
rendit en Gaule où il fut consacré évêque d'York
par Agilbert, évêque de Paris. Wilfrid s'étant
absenté trop longtemps de son diocèse^ le peuple
demanda," à Oswin un autre évêque. Cedde,
abbé de Lestinghen, homme savant dans les -
Ecritures et de mœurs exemplaires, fut élu
31
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
évêque en 666. Wilfrid, de retour en Angleterre,
aima mieux retourner à son monastère de Répon
que de contester l'élection de Cedde. En 669
Théodore, archevêque de Cantorbér}', cassa l'or-
dination de Cedde et rétablit Wilfrid dans le
diocèse de York. Touché par l'humilité de
Cedde, Théodore et Wilfrid luidonnèrentl'Evéché
des Merciens. Il choisit Litchfield pour sa cathé-
drale et bâtit une église qu'il dédia à Ste Marie.
«^jjp
32
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
CHAPITRE V.
Organisation de L'Eglise Xationale.
V7 ^ l'an 668, Théodore de Tarse, moine ro-
J — ^ main, âgé de 66 ans, fut consacré arche-
vêque de Cantorbéry, Il parcourut tout les Théodore
lieux habités de l'Angleterre et rétablit le bon de
ordre dans toutes les communautés religieuses.
Théodore fut le premier archevêque à qui
toute l'Eglise anglicane se soumit; jusqu'alors
il n'}' avait pas eu d'église nationale. C'est à
Théodore qu'était réservée la tâche d'accomplir
cette oeuvre importante.
Le 2\ septembre 673, Théodore convoqua à
Hereford un concile des évêques de toute l'An-
gleterre. Un sommaire de l'Acte de ce concile
fut nettement dressé par Théodore Neuf réso-
lutions touchant le bien-être et le gouvernement
de l'Eglise furent adoptées, et chaque évêque y
apposa son sceau- Cette assemblée restera à
jamais mémorable, car, tout en consolidant l'unité
ecclésiastique, elle. fut la première qui revêtit un Concile
caractère vraiment national, puisqu'elle devait y^,,^^
où
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
légiférer toute l'Angleterre. Elle développa
l'idée de l'unité nationale, étant ainsi le précurseur
du Parlement national. Ainsi nous vo^'ons que
c'est l'église qui consolida l'Angleterre et donna
naissance au parlement. La monarchie anglaise
ne devait commencer que 155 ans plus tard.
Théodore se montra plus indépendant de
l'évêque de Rome, que Wilfrid ne l'avait d'abord
espéré. Enire autres choses le concile d'Hereford
avait divisé le diocèse d'York en cinq parties.
Après avoir vainement protesté contre le démem-
brement de son diocèse. Wilfrid se rendit à Rome,
pour demander justice au Pape. Cet appel
d'un évêque anglais à Rome est resté célèbre
dans l'histoire, et la page qu'il vint ajouter aux
annales de l'Angleterre ne laissa pas de produire
une impression étrange, vu qu'il n'avait encore
aucun précédent. Le pape Agathon assembla un
concile de plus de cinquante évêques, qui déclarè-
rent que Wilfrid avait agi avec prudence et ordon-
nèrent qu'il fut rétabli dans son évêché et que les
évêques primitivement installés par Théodore fus-
sent déposés. Wilfrid, à son retour en Angleterre,
alla trouver le roi de Xorthuml^er et lui présenta les
décrets du Saint Siège .sou.scrits par tout le concile
de Rome, avec les bulles et les .'^ceaux. Le roi
:^4
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Elfrid assembla la noblesse et le clergé. Ceux-ci
rejetèrent immédiatement le décret papal et
Wilfrid fut condamné à neuf mois de prison dans
un caveau très obscur. Ainsi se termina d'une
façon lamentable le premier appel à la cour de
Rome. Ce fait établit clairement que jusque là
réglise anglicane était indépendante de la juri-
diction romaine.
Après sa mise en liberté, Wilfrid alla avec
cinq prêtres prêcher l'Evangile aux habitants de
Sussex. Ceux-ci ignoraient entièrement le Chris
tianisme quand le saint évêque se rendit parmi IViffrid
eux. Ces habitants étaient tellement barbares 'Convertit
, les habi-
que. quoiqu'il 3^ eût a cette époque une grande tants de
famine, ils ne savaient comment pêcher les pois- ►^'//j.s-é'-r.
sons qui abondaient dans la mer et dans toutes
les rivières du pays. Wilfrid leur apprit à pren-
dre des poissons avec des seines. Ces barbares
en vinrent à aimer le saint homme et se converti-
rent en grand nombre. Ayant fondé le monastère
de Selsey, Wilfrid marqua le commencement de
son épiscopat par un acte de charité qui perpétuera
sa mémoire. I^e roi Ethelvale avait donne ^
Wilfrid une terre avec laquelle étaient compris
comme esclaves tous les habitants au nombre de
300. Aussitôt qu'il fut en possession de ce terrain,
3.S
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Concile
de
Franc-
fort.
Wilfrid rendit la liberté à tous ces esclaves.
Après avoir été évêque 45 an.-^, Wilfrid mourut
eu l'an 707, et fut enterré à Répon.
C'est avec Wilfrid que se termina la plus
brillante époque de l'histoire ancienne de l'Eglise
anglicane. Dans toute la chrétienté l'Angleterre
était appelée "une source de lumière." En
aucun pays du monde le christianisme n'a laissé
d'impression plus profonde.
En Tan 792, le roi Charlemagne avait invité
les évêques anglais à se soumettre aux décrets de
l'église grecque en faveur du culte des images.
Les protestations de l'église anglicane furent si
énergiques que Charlemagne dut convoquer un
concile de 300 évêques à Francfort. Le concile
condamna cette doctrine. Ainsi l'Angleterre pré-
ser\'a, pour un temps du moins, l'Eglise universelle
de ce qui était non seulement une grande erreur,
mais même une coutume idolâtre. Bn l'an 754 le
concile de Constantinople avait déclaré le culte
des images, positivement condamné par le second
Commandement, et par suite contraire aux ensei-
g^nements de l'Eglise primitive.
36
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
CHAPITRE VI.
Invasions des Danois et des Normands.
L'invasion danoise arrêta non -seulement les
progrès du Christianisme, mais même dans cer-
tains endroits, en effaça entièrement les traces.
En 835 ces hommes du Nord débarç|uèreut sur
ies côtes de Cornouaille, dévastant le pays
pendant 15 ans, pillant et brûlant les églises et
les monastères. Les prêtres et les évêques furent
tués en grand nombre. De tous les royaumes de
l'heptarchie il n'y eut que celui de Kent qui ne
tomba pas sous la domination des Danois. Alfred
le Grand, étant devenu roi, réussit par une série
de victoires à obtenir un traité de paix. Après
la bataille d'Kthandum, en 878, les Danois accep-
tèrent le Christianisme, et s'établirent en Angle-
terre. Dunstan, évêque de Worcester, rétablit
la discipline dans tous les monastères qui n'avaient ^^^^^^^'
pas été détruits et encouragea beaucoup l'édu-
cation.
Une nouvelle invasion danoise allait encore
retarder la prospérité de l'Angleterre, quand
37
L'HGLLSE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
le puissant chef danois, Canut, I fut converti au
Christianisme. Bientôt la paix revint et Canut
Canut I. ^^^ Y^^^ jQj^ ^^^ gç^^l maître de toute l'Angleterre.
Il fit rebâtir les églises qu'il avait brûlées, et
dota magnifiquement les abbaN'es et les monastères
qu'il avait spoliés.
En l'an 1042 Edouard le Confesseur fut con-
Edouard sacré roi dans la grande cathédrale de Wi-nchester.
^^ Ce prince contribua beaucoup au relèvement du
seur. peuple, mais tavorisa 1 introduction des étrangers
dans les fonctions ecclésiastiques. Impossible de
dire jusqu'où il serait allé si ne l'en eût empêché
le fameux gouverneur Godwin,
En 1066 Guillaume, duc de Normandie,
appuvé par l'évêque de Rome, résolu de faire
Lriii au- 1^ conquête de l'Angleterre. Avec une armée
Coyique- de 66,000 hommes il battit les Anglais à Hastings,
et s'empara de la royauté. Le pape alors le
pressa de rendre hommage à l'église de Rome.
La réponse du roi à l'ambassadeur du pape
est devenue historique. "Je n'ai pas choisi
de te rendre hommage et je ne le ferai pas ; je
n'ai fait aucune promesse à cet effet ; de
plus, je ne sache pas qu'aucun de mes prédéces-
seurs ait rendu hommage à l'évêque de Rome."
38
tant.
L'EGLIvSE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Cette réponse de Guillaume montre que jusqu'à
<jette époque, au onzième siècle, le pape n'avait
de juridiction ni sur l'église, ni sur la couronne
d'x\ngleterre. Ce fait est important puisque
nous entendons si souvent dire que l'Eglise, en
Angleterre, était sous la domination papale avant
la réforme du XVIième siècle.
Jusqu'à la conquête par les Normands,
l'Eglise anglicane, tout en étant en communion
avec l'Eglise romaine, en était parfaitement in-
dépendante. Par sa constitution ecclésiastique,
l'Eglise anglicane reconnaissait deux provinces,
Cantorbérv et York. L'Archevêque de Cantor-
béry, était comme de nos jours, le primat de
toute l'Angleterre et ne reconnaissait aucun
vsupérieur ecclésiastique.
E'Eglise de Rome, toutefois, faisait de plus
en plus valoir ses prétentions à la suprématie, et
ses efforts furent grandement secondés par les ^/{o-yan-
prélats étrangers qu'Edouard le Confesseur avait disse-
encouragés et que Guillaume le Conquérant éta- la Suprê-
blit dans toutes les villes du royaume. Le inatie
chemin fut ouvert aux empiétements de la papauté P'^P'^^^-
sur ce qui avait été, jusqu'à ce jour, les droits
indépendants de l'Eglise et de la couronne
d'Angleterre.
39
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Les Normands donnèrent une nouvelle im-
pulsion à la vie monastique. Guillaume et ses
barons fondèrent un grand nombre de monastères,
leur appropriant les biens qui avaient été
anciennement donnés aux Eglises par les Saxons.
Dans presque tous les cas ces richesses allèrent
grossir les revenus des communautés religieuses
protégés par les Normands. Le pays se couvrit
de vastes monastères et d'imposantes églises.
C'est ainsi que l'Angleterre fut abandonnée
comme une proie, à la cupidité des étrangers.
Guillaume attribua 60,000 fiefs à ses chevaliers
aux dépens des Saxons et consigna les noms des
nouveaux propriétaires dans le livre noir de la
conquête. ( Doomsday Book. ) C'est ainsi que
nous y lisons la description des biens appartenant
au siège épiscopal de Cantorbéry, ainsi qu'à
plusieurs églises d'autres comtés. Par exemple,
243 églises avaient des propriétés dans le diocèse
de Norfolk, et 364 autres en possédaient dans
celui de Sufïolk. Ces biens a3'ant appartenu à
l'Eglise anglicane depuis plus de 800 ans, lui
donnèrent des titres de propriété plus anciens que
tout autre propriétaire en Angleterre.
Guillaume le Conquérant mourut en l'an
1087. Il eut pour successeur son fils, Guillaume
40
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
le Roux. Ce prince bannit de son rovaume les Guillau-
messagers que le pape Lrbam lui avait envoves i^ Rqux.
au sujet d'Anselme, archevêque de Cantorbéry,
qui en avait appelé au pape de la confiscation
des revenus de l'Eglise au profit de la couronnt-.
En dépit de la condamnation de Rufus par un
concile tenu à Rome en 1099, Anselme ne put
gagner sa cause.
Sous le règne d'Henri I. Anselme renouvela
son appel à Rome. Le pape Pascal II écrivit au Roi
d'Angleterre, lui deniandant que l'archevêque tût
rétabli dans son diocèse sans autre investiture
que celle du pape. Henri I répondit que
l'opinion du pape et les décisions du concile romain
n'étaient d'aucune A'aleur pour lui. " Je ne veux
ni déroger aux coutumes de mes pfédécesseurs,
ni tolérer dans mon royaume aucun homme qui
ne soit pas mon sujet."
De cette querelle des investitures entre
l'archevêque de Cantorbéry et le roi Henri I, il
ressort que le pape n'avait aucune juridiction
sur la couronne ou le royaume d'Angleterre.
Sous Te règne d'Henri II, en 1163, Thomas
à Bequet, archevêque de Cantorbéry, voulut qu'un
ecclésiastique, même pour les crimes commis
41
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME,
contre les lois civiles, ne put être poursuivi que
devant le tribunal ecclésiastique, ce tribunal ne
pouvant infliger d'autre châtiment que la dégra-
dation ou la destitution du coupable. Ce fut la
cause d'une longue querelle qui ne se termina que
par l'assassinat de Bequet. La consternatiou
créée pai ce meutre fut si grande que le roi jugea
prudent de céder, et de cette façon l'Eglise
obtint tous les privilèges qu'elle réclamait.
'^IAP
42
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REl-ORME.
CHAPITRE VII.
La Grande Chartk de Liberté.
En 12 13 Innocent III, le plus grand des
papes, obligea Jean-Sans-Terre, roi d'Angleterre, à
reconnaître comme archevêque de Cantorbéry
Etienne Lan^ton, et à rétablir tous les prélats ^.tienne
. . , Langton.
romains qu'il avait chasses du royaume. En outre
Jean-Sans-Terre s'engageait à conféier au pape le
patronage de tous les évêchés, à ne reprendre
les insignes de la royauté, qu'avec l'assentiment
du saint Père ; en un mot faire du royaume
d'Angleterre un fief de la cour de Rome. Ainsi
la couronne d'Angleterre passa sous le joug de
la papauté. Toutefois l'Eglise resta libre
comme le montre le fait que Langton persuada
les Barons de résister à Jean- Sans-Terre. En
1215 ils lui firent signer un pacte devenu /é-aw-
célèbre sous le nom de la " Grande Charte de -r^^^' ^f
Liberté.-" Le premier article de cet acte déclarait les
solennellement " la liberté de l'Eglise anglicane, ^'^^<^^'■^•
et le maintien de tous ses droits et privilèges."
43
L'EGLISE ANGIJCANE AVANT LA REFORME.
A la nouvelle de cet échec, Innocent III
frappa d'anathènie les barons et Langton. Il
somma Jean-Sans-Terre d'annuler la Grande
Charte, mais celui-ci trop profondément humilié,
répondit, " que depuis sa réconciliation avec le
pape tous les malheurs lui étaient arrivés."
Innocent III mourut en 1216 sans avoir reçu
la vassalité de 1" Angleterre. Etienne Langton
continua pendant 12 ans encore à revendiquer les
libertés de l'Eglise et delà couronne d'Angleterre.
En 1265, Simon de Montford, comte de
Premier Leicester, convoqua le premier parlement national.
D f Ali.
ment' "^ dater de ce jour on passa plusieurs actes pour
Xatic- protester contre les prétentions de l'évêque de
'^^ * Rome. Sous le règne d'Henri III, le Parlement
fît une loi ordonnant de saisir et d'emprisoinier
toute personne portant un mandat venant du
pape. LTne lettre fut envoyée au concile de
Lyon, 1250, s'élevant contre les impositions delà
papauté, et annonçant la détermination de ne
plus les souffrir. Plus tard, l'évêque Grossetête,
de Lincoln, fit de l'opposition au pape
Innocent IV, et lui écrivit " qu'il résisterait
à toutes les instructions venant du pape."
Quand l'évêque Grossetête mourut en 1254, le
44
L'RGUSE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
pape ordonna aux fidèles de 'se réjouir de la
mort de son ennemi."
En 1297 le roi Edouard I résista ouvertement
au pape Boniface VIII, et le força d'annuler le ^.^'^y^^f'^
décret de l'année précédente qui enjoignait à tous Edouard
les peuples chrétiens de ne prélever aucune co:i-
tribution sans la permission deTévêque de Rome.
Le Parlement de Lincoln \1301), composé non-seu-
lement des barons et des représentants du peuple,
mais aussi de deu:: archevêques et de i S évêques,
adopta à l'unanimité la proposition suivante: —
*■ Nous avons déterminé que, eu ce qui con-
cerne les droits du royaume d'Ecosse, de même
que dans tous ses autres droits, le roi notre
seigneur ne se soumettra en aucune manière au
pape et ne permettra qu'aucun de ses actes soit
le sujet d'une enquête à Rome, et personne
n'aura le dr(jit de le représenter devant pareil
tribunal."
En 1341 , Edouard II protesta énergiquement
contre les empiétements de la papauté. Edouard
III, sonnné par le pape Urbain V de rendre Edouard
hommage au siège de St. Pierre, refusa de le Z/^-
faire, et fut appuyé par le Parlement anglais qui
décida en 1344 qu'aucun ecclésiastique ne serait
iu.stallé dans une cure par un décret du pape.
4.D
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
En 1350, le Parlement fit passer un acte
dont le préambule déclarait que "' la sainte église
d'Angleterre fut établie dans notre royaume pour
donner au peuple la connaissance des lois de
Dieu." Les empiétements de la papauté, que
cet acte voulait restreindre, sont dénoncés comme
"tendant à annuler la sainte église d'Angleterre."
En 1365 le pape Urbain V s'avisa de réclamer
les arrérages du tribut qui. depuis 33 ans n'avait
pas été payé à la cour de Rome. Pour repousser
ces présentions, Edouard III s'adressa à Jean" de
Wiclef, qui justifia la confiance de son souverain
dans un mémoire plein de vigueur, dans lequel
il rejetait toute idée de vasselage de l'Angle-
terre envers la papauté. En 1366, le roi incita la
haute chambre du Parlen'.ent à déclarer que les
prétentions du pape " n'étaient ni justes ni
honorables. ' '
Au millieu du XlVième siècle, il n'\' avait
encore en anglo-saxon que quelques extraits de
l'ancien Testament. Wiclef résolut de donner à la
nation une instruction biblique, traduisit lui-même
en [378 le Nouveau Testament, et fit traduire l'an-
cien par Nicolas Herford. Il fit copier en outre
des portions séparées, à l'usage des prédicateurs
ambulants qu'il euvo}ait dans différentes
46
f
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
directions, partout où ils trouvaient des auditeurs
de bonne volonté, afin de leur annoncer la parole
de Dieu. Wiclef mourut en paix à Lutterworth
en l'an 1384, après avoir établi sa protestation sur
la base solide des principes. Wiclef appelé souvent
' 'l'étoile du matin de la Réforme' ' était né en i 324.
Il étudia à l'un des cinq collèges qui seuls existaient
alors à Oxford. En 1361 il devint directeur de ce-
lui de Balliol et fut nommé agrégé du collège de
Merton. Appelé par la couronne en 1372 à faire
partie d'une commission chargée de traiter à
Bruges avec les délégués pontificaux des griefs
mutuels des deux pouvoirs, Wiclef dut bientôt —
1382 — comparaître, sur l'ordre du nouvel arche-
vêque de Cantorbéry, Guillaume de Courtenaj^,
devant un concile dont la majeure partie se
composait de moines mendiants. Des 24 proposi-
tions extraites de ses écrits on en condamna dix
comme hérétiques, et on déclara le reste erroné
et pernicieux. Toutefois dans sa chaire et dans
ses écrits, Wiclef continua jusqu'à sa mort à
combattre les abus et les erreurs de l'Eglise
romaine.
En i393leslois "praeinunire" furent renouve-
lées afin de créer en faveur du roi un nouveau
rempart contre les prétentions de l'Eglise romaine.
47
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
ifJ^,.,,,. P^"^!" ces lois il était défendu à tout sujet ano^lais
nire. d'en appeler à la cour de Rome, ou de se soumettre
aux exconnnunications du pape. Il était
même défendu à tout représentant du pape de
débarquer en Angleterre sous peine de châtiment
rigoureux, et de confiscation de ses biens au
profit de l'Etat. En 1399, quand Richard II fut
dépo."^é, la plus forte accusation contre lui fut
qu'il avait sollicité du pape la ratification de ses
actes. Le Parlement, dans cette circonstance,
déclara " Que les droits du royaume et de la cou-
ronne d'Angleterre avaient toujours été libres,
que ni le pape, ni aucun autre étranger, n'y
avaient droit d'intervention." De 141 7 à 1426 le
pape Martin V demanda à plusieurs reprises
r^' ^^^ qu'on annula les lois " praemunire," et chaque
fois le Parlement résista aux prétentions du
pontife. Quand, exaspéré par tant de résistance
Martin V eut frappé d'anathème l'archevêque
Chicheles et tous les évêques anglais en 1426,
le Régent Humphre}', duc de Gloucester, brûla
publiquement les bulles papales. Ces faits
démontrent clairement que l'Eglise romaine n'a
jamais été la maît res.se de l'Angleterre. Ce
fut l'Eglise anglicane, '' ecdesia anglicana,''
que la grande Charte de Jean-Sans-Terre déclarait
4.3
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
libre, et dont les libertés devaient être inviolables.
Le pape, il est vrai, fit quelquefois sentir son
influence, puisque, comme nous l'avons vu, le
Parlement Anglais dut légiférer, à diverses
reprises, afin de réprimer ses prétentions, jusqu'au
jour oii, sous le règne d'Henri VIII, 1531, il les
repoussa à jamais.
"^^IW
ïm^
49
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
TROISIEME PARTIE.
CHAPITRE VIII.
Decadenxe de L'Eglise Romaine.
La Réforme en Angleterre rejeta effective-
ment la domination papale si injustement imposée
aux Anglais contrairement aux décrets du trois-
ième Concile d'Eplièse. Ce gran dconcile de
toute la chrétienté en 431 se prononça ainsi,
" Xous déclarons ici que les prélats de
l'Eglise cypriote consacreront eux-mêmes leurs
évêques, sans qu'il leur soit opposé aucun obstacle
ou empêchement ; de plus, nous déclarons que cette
règle devra aussi être observée partout dans les
^, autres diocèses et les autres provinces: de
Décret ,, , , ^. ,. , .
du telle sorte qu aucun eveque n niterviendra
Illieme dans les affaires d'une autre province qui n'a
CoHQile '.' j- 1 . • V
d'Ephèse. P^^ ^^^ ^^^ ^^ commencement soumise a son
administration ni à celle de ses prédécesseurs ;
de plus, si quelque prélat a commis un empiète-
50
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
ment de ce genre, ou s'il s'est attribué de force le
gouvernement d'un diocèse, il sera obligé défaire
restitution, afin que les canons décrétés par les
Pères ne soient pas enfreirits, que la prêtrise ne
devienne pas une occasion ou un prétexte pour
Torgueuil du pouvoir temporel, il a donc paru
juste au présent saint concile oecuménique que
les droits de chaque province restent intacts et
inviolables, selon l'usage qui a toujours prévalu."
(Concile d'Ephèse, Canon VIII.) Cet article
condamne donc les catholiques romains qui préten-
dent que les canon s de l'Eglise sont les mêmes dans
tous les âges. Même d'après le concile d'Ephèse,
concile de 200 évêques, ils sont desschismatiques,
puisqu'il n'existe aucun doute qu'avant la venue
d'Augustin en 596, l'Eglise de la Grande Bretagne
était indépendante du Pape. Toute juridiction de
l'évêque de Rome sur l'Eglise anglicane après
cette 4até (596) était nécessairement contraire
aux décrets de l'Eglise catholique. Grégoire le
Grand, à l'occasion de son élévation à l'évêché de
Rome, dans une lettre au patriarche d'Alexandiie,
avait promis de se conformer aux décrets du
Concile d'Ephè.se "comme aux quatre Evan-
giles."
51
Décade n-
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME
Sans doute l'évêquede Rome envoya Augus-
tin en Angleterre ; mais il ne faut pas oublier
qu'entre L'Eglise romaine du temps d'Augustin
cède et le Romanisme de nos jours il }• a une
l Eglise orande différence. L'Eerlise de Rome n'a pas
romaine ^ , , .
toujours enseigne les doctrines qu'elle pratique
aujourd'hui. Il ne faut pas oublier non plus que
l'Eglise de Rome fut jadis sainte et apostolique.
Rappelons en peu de mots quand et comment eut
lieu sa décadence.
Après que l'empereur Constantin eût soumis
l'P^mpire romain, et fondé un empire universel,
il trouva que la population de la ville de Rome
se composait d'éléments hétérogènes, c'est à-dire
f^fj de chrétiens et de païens. Le premier problème
à résoudre était une question politique, à savoir,
comment allait- il affermir et perpétuer son pouvoir^
C'est grâce au concours et à la vaillance des
chrétiens qu'il était monté au pouvoir, il était
donc nécessaire de se les concilier et de s'assurer
leur support. C'est pourquoi il combla l'Eglise
de faveurs et la couronna des splendeurs terres-
tres. Comme un prince, l'évêque de Rome
pouvait se promener dans un chariot d'Etat.
Bientôt des discussions acharnées s' élevèrent entre
52
î/EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
les Pères de l'Eglise. Cette polémique nécessita la Union de
convocation de conciles sous la présidence de ^ ^f^^^^
Constantin qui réunit ainsi l'Eglise a l'Etat et VEtat.
s'assura le soutien des chrétiens. Ceux qui
étaient à la tête de l'Eglise, cédant à la cajolerie
et au pouvoir, ne firent entendre que de faibles
protestations.
Fort de l'appui des chrétiens, Constantin
voulut soumettre ses sujets païens par la
persécution. Il expulsa leurs prêtres d'abord
de leurs temples et les vierges vestales de leurs
couvents. Mais voyant que ses efforts ne
lui attiraient qu'une plus grande haine et une
opposition des plus acharnées de la part des
païens, l'empereur eut recours à des moyens
plus pacifiques, il ordonna qu'on baptisa tous les
temples païens au nom de la sainte Trinité, hitroduc-
et qu'on les livra ensuite au culte chrétien sans p^^ ^^^
aucun changement. Les autels, les chambres dans
secrètes et les temples païens devinrent donc des V, "^^^
autels, des chambres secrètes et des temples chré-
tiens. Nombre de païens furent baptisés au nom
de la Sainte Trinité, et déclarés chrétiens, tout en
restant idolâtres de cœur et païens de caractère.
Ce fut alors que le levain corrompu du paganisme
conmiença à emj3oisonner l'Eglise romaine,
53
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Au \'IIIième siècle Boniface IV consacra, au
milieu de grandes et solennelles cérémonies, le
Panthéon (auparavant dédié "à Jupiter et
à tous les dieux") " à la Sainte Vierge et à tous
les saints." Ainsi le peuple, pouvait comme
aux temps païens, aller au Panthéon se choisir
des dieux et des patrons chacun selon son goût
et son caprice.
Les prétentions de l'évêque de Rome et les
erreurs papales sont de date comparativement
Suprt- , __^,, , . .
matie du récente. Elles étaient inconnues du temps d Au-
Pape. gustin. Au commencement du septième siècle
seulement les papes aspirèrent à la suprématie
sur toutes les églises. Grégoire le Grand
lui-même s'opposa à leurs prétentions et
déclara anathèmes les évêques qui nourrissaient
de telles aspirations. Ce fut un de ses successeurs,
Boniface III, qui. en 607, se déclara évêque
universel, tandis que l'infaillibilité du pape ne
date que de 1870. Mais si les papes sont
infaillibles, ils ne peuvent pas êtie chefs de toutes
les églises, puisque Grégoire le Grand a condamné
cette doctrine comme anti-chrétienne ; et si
Grégoire s'est trompé, alors les papes ne sont pas
infaillibles. Du reste, pour bien montrer T inanité
-de celte doctrine., nous n'avons qu'à rappeler que le
54
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
pape Hoiiorius (625-638) fut accusé d'hérésie et
finalement déposé parle sixième concile. Pendant
plusieurs siècles les papes eurent à prononcer
l'anathème contre Honorius et sa doctrine.
La Réforme en Angleterre n'a pas créé
une nouvelle Eglise; elle a purifié l'ancienne
Eglise des superstitions et des erreurs de l'Eglise
romaine. Il peut arriver que, par suite de mau-
vaises influences, un homme bien élevé vienne à z-^;^-;;^/;'^'^
se dégrader. S'il abandonne ses in3.uvaisç:s pas créé
habitudes nous disons qu'il s'est réformé. Son ^^Jj^^^^n^
changement de vie, ou pour mieux dire la réforme Eglise
qui s'est opérée en lui n'a pas altéré son identité. /^^i^i^_
Il en fut ainsi de l'Eglise en Angleterre. La terre.
Réforme n'est pas venue du dehors, elle s'est
opérée au sein même de l'Eglise nationale qui
conserva ses mêmes temples et ses mêmes fidèles.
Ce furent ses évêques et ses prêtres convoqués en
S}' node qui réformèrent les doctrines et les usages
de l'Eglise. L'Eglise anglicane fut presque
unanime à rejeter les prétentions de l'évêque de
Rome. De 9400, qu'était le nombre des membres
du clergé à l'accession au trône de la reine
Elisabeth (155S), il n'y en eut que 1S9 qui
refusèrent de revenir aux anciens privilèges et
aux traditions de l'Eglise primitive. Pendant
55
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
les onze premières années du règne d'Elisabeth
il n'y eut qu'une seule et même Eglise pour tous
les Anglais. Ce n'est qu'en 1570 que le pape,
voyant qu'il ne pouvait persuader les Anglais à
se soumettre à son autorité, envoya des ecclésias-
tiques romains en Angleterre. Ceux-ci persuadè-
rent un petit nombre d'Anglais d'abandonner
leurs églises. En 1581, date de son organisation,
l'Eglise romaine devint un corps scliismatique en
Angleterre.
"^W
5'''
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
CHAPITRE IX.
Consécration de L'Archevêque Parker,
AfÎD d'échapper à cette accusation que la
Hiérarchie auglo-romaine est schismatique, les
catholiques romains ont prétendu qu'à la Réforme
(en Angleterre) il y eut extinction du corps
épiscopal, qu'il fallait donc rétablir une succession
légitime, et la consécration de l'archevêque
Parker a servi de prétexte à cette assertion
purement gratuite. Rappelons les faits.
Le siège de Cautorbéry étant devenu vacant
par la mort du cardinal Pôle, le 17 novembre
1558, la reine Elisalx:th nomma pour lui succéder
le docteur Matthieu Parker. Qui fut dûment iY^^'
élu, en vertu de "Congé d'élire' \ par l'^ Parker,
doyen et le chapitre de Christ Church, Cantor-
béry. Le 9 septembre 1559, trois prélats créés
sous le règne d'Edouard VI, et trois prélats créés
par la -reine Marie Tudor, furent invités à
procéder sans délai à la consécration de Paiker.
Les trois derniers refusèrent de prendre part à
cette consécration, et en conséquence quatre autres
57
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
évêques furent nommés le 6 décembre pour les
remplacer.
Des Sept évêques ainsi choisis, quatre devaient
prendre part à la cérémonie de la consécration,
bien que la validité d'une telle consécration fut
reconnue par la coutume de l' Eglise anglicane si
trois évêques au moins prenaient une part active
à la cérémonie.
La consécration de Parker eut lieu le 17
décembre 1559 dans la chapelle du palais de
Lauibeth, en présence d'un grand nombre de
Gnilliu- spectateurs. Les évêques consécrateurs furent
tne Guillaume Barlow. évêque de Bath et Wells,
hat ow consacré évêque de St. Asaph en 1536, sous
feati ^^ règne d'Henri VIII ; Jean Scory. évêque de
Sco7'y Chichester, consacré évêque de Rochester sous
Miles le règne d'Edouard VI, en 1551 ; Miles Coverdale,
Coverda- auteur d'une traduction de la Bible, évêque
^' d'Exeter, consacré évêque suffragant .sous le
Tean règne d'Henri VII ; enfin Jean Hodgkins,
Hodgkins consacré sous le règne d'Edouard VI. Le
docteur Thomas Yale lut le mandat ro\al
relatif à la cérémonie, puis tous les évêques
irapo.sèrent les mains à Parker en répétant
toutes les paroles essentielles de l'acte de
consécration.
58
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Nous nous sommes longuement étendus sur
tous ces détails parce que plus tard on a
essa3'é d'élever des doutes sur la validité de
la consécration de l'archevêque Parker. Ce
ne fut d'ailleurs que cinquante ans plus tard qu'on
lança les premières objections. Pour les réfuter
nous nous contenterons de citer les paroles d'un
auteur anglais. "Des quatre évêcues qui prirent
part à cette consécration, Barlow et Coverdale
étaient les seuls titulaires légaux de leur diocèse ;
Scory et Hodgkins remplissaient tous deux les
fonctions d'évêques adjoints de Bonner dans le
diocèse de Londres. De ces quatre prélats
les deux premiers avaient hérité du droit
canonique d'agiraunom de la province, et Bonner
avait laissé aux deux autres leur liberté d'action,
car Bonner, quoique n'approuvant pas la nomina-
tion de Parker, n'avait élevé aucune protestation
contre cet acte, et le sanctionnait ipso facto, par
cela même qu'il ne mettait aucun obstacle à
l'action de ses deux sufîragants. Les huit
prélats créés sous la reine Marie, qui seuls survé-
curent à l'année 1560, ne firent aucune protesta-
tion. L'affaire fut décidée contre eux par défaut,
et depuis le règne de Jacques I jusqu'à celui de
Victoria, lesévêques titulaires au soins de qui les
59
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
fidèles d'Angleterre s'étaient confiés n'exercèrent
aiicuîie juiidiction locale jusqu'en 1850, c'est-à-
dire jusqu'à près de 300 ans plus tard. L'argu-
ment fondé sur l'extinction du clergé national
n'est donc pas admissible. . . . Pui.squ'il en est ainsi
l'intrusion d'une hiérarchie étrangère (en Angle-
terre) viole les lois de l'Eglise et les déclarations
des Pères." (Littledale, Simples Raisons pp.
238-239.)
L'Eglise anglicane, disent les controversistes
romains, n'a qu'un titre douteux pour conférer
les ordres sacrés et pour administrer les sacre-
ments, et, pour le prouver, ils s'appuient
sur le fait qu'on ne retrouve plus un des
documents parmi une longue série de pièces
attestant le caractère épiscopal de Guillaume
Barlow, un des quatre prélats qui consacrèrent
l'Archevêque Parker. " Il est facile de répondre
à cela," dit le savant docteur Littledale, " que
toutes les pièces sur lesquelles on s'appuyait pour
prouver la consécration de tous les évêques de la
chrétienté pendant les quatre premiers siècles
sont perdues sans icssource." (Simples Raisons,
Gardifiûr V^S^ 25.) L'évêqiie Gardiner est absolument
dans le. même cas que Barlow, et pourtant aucun
catholique romain ne s'est avi.sé de lui contester
60
I/EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
son rang. De même il n'existe aucun document
relatif à quatre des sept prélats qui consacrèrent
le cardinal Pôle. Cependant nous possédons un
grand nombre de preuves que l'évêque Barlow
était reconnu par tous les autres évêques pendant
les dix dernières années du règne d'Henri \'III.
Une des meilleures preuves en faveur de la vali-
dité du sacre de l'Archevêque Parker est que les
évêques élus sous le règne de Marie Tudor ne pro-
testèrent jamais contre cette consécration, et que
celle de Barlow ne fut mise en doute qu'après
plus de quatre-vingts ans. Dans un discours
prononcé à Bonn en 1875, le savant docteur
Dollinger dit " Le fait que Parker fut consacré
avec l'imposition des mains et avec les paroles Dolli
requises par quatre évêques, eux-mêmes légale- ^^*'-
ment consacrés, est si bien attesté que ceux qui
le mettent en doute cherchent à s'aveugler volon-
tairement." Enfin l'évêque Bossuet lui-même '^''■^■^''''^
accepta la validité de la consécration de Parker,
et il est bien probable que la grande majorité des
historiens catholiques romains de nos jours sont
de la même opinion.
L'histoire que l'ordination de Parker eut lieu
à la taverne de Xag's Head est une fable absurde
61
n-
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
et pleine de contradictions. Nous nous étonnons
qu'il se trouve encore des catholiques romains
Y J intelligents qui continuent à y croire. Le pape
Head. Léon XIII, n'en dit pas un mot dans son ency-
clique sur la validité des ordres anglicans. Dans
sa préface à l'ouvrage du Cardinal de la Luzerne
sur les droits des évêques, l'archevêque de Paris
de répoque (1845) dit : "L'Eglise anglicane fut
la seule des sectes protestantes qui conserva son
épiscopat." — Lingard ( History of England VII
Note I.) — dit: 'La cérémonie de la consécra-
tion de l'Archevêque Parker fut célébrée,
quoique avec une légère différence, selon l'ordi-
naire d'Edouard VI. Deux des consécrateurs,
Barlow et Hodgkins, avaient été ordonnés évê-
ques, conformément au Pontifical Romain ; les
deux autres selon l'ordinaire réformé. ( AVilkins
Concilia IV, 198.) Il ne saurait exister aucun
doute sur cette consécration, qui eut lieu le 17 Dé-
cembre 1559"' (Wordsworth. De l'Eglise, p. 223.)
Voulant à tout prix discréditer la Réforme
en Angleterre, les catholiques romains ont
prétendu que c'était pour des motifs inavouables
que LEglise anglicane s'était séparée de l'Eglise
Divorce . ji ^ . • '.. •<. ^
d'Henri romaine, en d autres termes que c était pour
VIIT. permettre à Henri \'III de divorcer. Montrons
62
L'RGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
la fausseté de cette assertion en donnant quelques
détails sur la vie privée de ce prince. Henri
VII eut deux fils. Arthur et Henri. Arthur, h^ ^^
' Jules II.
avec l'assentiment de son père, avait épousé la
princesse Catherine d'Aragon. A la mort de ce
prince, Henri VII, au mépris des lois de l'affinité,
fiança la veuve au jeune Henri, qui devint ainsi
le mari de sa belle-sœur. Le pape Jules II avait
accordé en 1504 une dispense pour ce mariage
illégal, qui, loin de plaire à Henri, le faisait passer
pour un prétendant forcé. Ajoutons que ce
prince, le plus absolu de son temps, et l'un des
plus fidèlement dévoués à la foi catholique
romaine, qui pour des raisons d'Etat s'était laissé
persuader par ses conseillers d'épouser Catherine
d'Aragon, vit tous ses enfants mourir à la fleur
de l'âge à l'exception de la princesse Marie, qui
fut fiancée à un prince français. Plus tard,
quand le roi de France se fut opposé à cette union,
alléguant que la cour française doutait de la
validité du mariage de Catherine d'x\ragon, le
roi Henri VIII en vint à penser que cette union
avec sa belle-sœur, bien qu'autorisée par le pape
Jules II, était' dé.sapprouvée par le ciel, était
contraire aux canons de l'Eglise, et que, par
suite, on pourrait un jour contester les droits de
63
Iv' EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
VII.
sa fille Marie, alors seule héritière de sa couronne,
il se décida donc à divorcer. Mais, pour divorcer,
il lui fallait une nouvelle autorisation du Saint
Cle^nent Siège. Le roi pria donc le pape Clément VII de
déclarer nul le mariage que Jules II avait à tort
sanctionné. Malgré la proche parenté de Cathe
riiie d'Aragon avec l'empereur Charles-Quint qui
rendait cette dispense difficile à obtenir, le pape
en 1527 fit pressentir une réponse favorable, et
envoya son Légat à Londres qui, de concert avec
le cardinal Wolsey, s'efforça d'engager la reine à
consentir au divorce et à se retirer dans un
couvent. Catherine refusa péremptoirement et
en appela au pape. Clément VII espérait par la
lenteur des négociations lasser la constance du
roi ; il lui offrit positivement une dispense pour
épouser deux femmes, de même qu'il avait
autorisé la polygamie du comte de Gleichen
(Chastel, Hist, du christianisme Tome IV, page
287 — Luther's Briefe, V, 994), mais Henri VIII,
perdant patience, favorisa la cause du clergé
national qui, comme nous l'avons vu, gémissait
depuis longtemps sous la domination papale. Il
pressa en 1531 l'adoption par le Parlement des
mesures que l'Eglise, dans deux convocations^
avait unanimement recommandées. Le Parle-
64
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
ment donc décréta que l'évêque de Rome n'avait
de juridiction ni temporelle ni spirituelle en
Angleterre, que tout appel au Saint-Siège était
interdit, et par un autre acte autorisa le roi et
Catherine de divorcer. Nous ne saurions excuser
ce divorce. Toutefois pour être juste envers
Henri VIII, disons que la question de son
mariage avec sa belle-sœur était une question
de droit canonique, et que les principales
universités d'Europe, consultées à ce sujet,
déclarèrent presque toutes la non-validité du
mariage.
Nous avons brièvement passé en revue les
intrigues et les passions de plusieurs années-
Ce qui, pour les Catholiques romains, serait la
cause principale de la Réforme anglaise, ne fut en
réalité qu'un petit incident d'un grand drame.
Comme nous l'avons prouvé, les Anglais depuis
des siècles voulaient s'affranchir de toute ingé-
rence papale. L'Eglise anglicane avait sans
cesse protesté contre les prétentions des papes.
La querelle d'Henri VIII permit à tous les
partis -en x\ngleterre de s'unir afin de repousser
pour toujours la suprématie de l'évêque de
Rome.
6s
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
L
CHAPITRE X.
Effets de la Reforme ex Angleterre.
A Réforme au X\'Iième siècle eut pour
principaux résultats de démontrer claire-
ment que :
Repudi- Premièrement, le pape ne peut avoir de
ation de - r r i ^
la juridiction en Angleterre à titre de Primat,
S^Pj'^^- pui.sque cette suprématie lui fut refusé d'une
du façon péremptoire par l'Eglise anglicane se fon-
^'^^^' dant sur ce que l'évêque de Rome a failli dans
la justification de ses droits, et qu'il u"a pas fait,
suivant les paroles du savant docteur Littledale,
une seule des démarches que le Droit canon rend
nécessaires pour prouver son titre d'héritage.
Dieu ayant limité la juridiction de l'apôtre
Pierre aux fidèles circoncis ( Gai IL 7-8, ) en
d'autres termes à l'Eglise des Juifs.
Deuxièmement, que le pape ne peut avoir de
juridiction en Angleterre à titre de patriarche
d'Occident, puisque nous savons que les limites
du patriarchat romain ne s'étendaient que sur dix
provinces en Italie ( Rufin, Hist. Eccles. 1-6).
66
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Elles n'allaient pas même jusqu'à Milan, encore
moins donc jusqu'à la Gaule ou la Grande
Bretagne. " Le fait de cette délimitation étroite
qui a été si souvent discutée," dit un historien
catholique romain," est établi par de nombreuses
preuves. Ce ne fut même qu'en 571 que les
papes purent pénétrer à Milan. En 583 Grégoire
le Grand, profitant d'une dispute locale, parvint
enfin à imposer son autorité à cette ville et à y en-
vo3'er un légat." (Fleury,Hist Eccles. XXXV-32).
Le huitième canon du concile général d'Ephèse
défend d'ailleurs au pape d'étendre les limites de
sa juridiction.
Troisièmement, que le pape ne peut avoir de
j uridiction en Angleterre à titre de "convertisseur,' '
— nous emplo5'ons ce mot en bonne part — puisque,
comme nous l'avons vu, la mission d'x\ugustin
ne contribua guère à la conversion de l'Angleterre.
Cette mission ne s'étendit jamais en dehors de la
province de Kent. La plus grande partie de
l'Angleterre Saxonne fut christianisée par les
missionnaires non-romains de l'Ecosse et de
l'Irlande.
"A l'argument," dit Littledale, *'que par
certains actes l'Eglise anglicane accepta de fait
67
VEGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Suppres-
sion
des
Monas-
tères.
l'autorité du pape, uous répondrous d'abord
qu'on avait consenti à cette soumission parce que
l'on croyait à l'authenticité des Fausses Décré-
tales et, par conséquent, au cachet obligatoire
que portait le droit canon basé sur ces décrétales ;
celles-ci provenant d'une fraude, rendaient parla
même la soumission nulle. Ensuite, lors même
qu'il n'en eût pas été ainsi, il aurait fallu un acte
formel, approuvé unanimement par un vS3'node
national, pour donner aux évêques anglais le
pouvoir de remettre à une autorité extérieure
les libertés de leur église ; or il n'existe pas
d'acte d'un tel sj-node. Enfin, en supposant
qu'une semblable détermination eût été prise, le
pape n'en restait pas moins incapable d'en accep-
ter les considérants à raison même du serment
qu'il avait prêté lors de son couroiniement
d'observer à la lettre les décrets d'Ephèse."
(Simples Raisons page 236.)
La Réforme eut aussi pour résultat de
supprimer des monastères qui fournissaient
d'immenses revenus à la cour de Rome. Sur
l'ordre d'Henri VIII en 1535 o\\ fit une
inspection générale des couvents du royaume,
surtout de ceux établis en Angleterre depuis
la conquête des Normands. Ces monastères
68
Tv'EGLISE ANGIvICANE AVANT I,A REFORME.
avaient obtenu des privilèges de l'évêque de
Rome, dépendaient inmiédiatenient de la cour de ,
Rome, formaient sa milice la plus puissante et la
plus dévouée, et prétendaient ne devoir aucune
soumission à l'Kglise d'Angleterre. vSur le rap-
port que firent les commissaires enquêteurs, des
irrégularités et des désordres qu'ils avaient décou-
verts, le Parlement supprima près de 400 monas-
tères de second ordre et coiifisqua leurs biens au
profit de la couronne. La suppression définitive
de tous les couvents et la saisie de leurs biens
furent achevées en 1539. On évalua à plus de
300,000 louis les revenus de ces biens, fort supé-
rieurs à ceux de la noblesse.
Un autre effet de la Réforme fut la publica-
tion en anglais d'un livre de prières publiques.
En 1542, par ordre de la convocation, on nomma
une commission chargée de réviser le code p ,,■
ecclésiastique et de traduire en anglais les services tion
de l'Eglise. Les commissaires rédigèrent lui ,-^^ ^
' , Livre de
nouveau catéchisme et dressèrent eu 1552 ww^ prières
confes.sion de foi en 39 articles qu'ils présentèrent ^^ , •
à la signature de tous les meml)res du clergé.
Mais le plus grand résultat de la Réforme
fut sans contredit le don inestimable de la Bible
69
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Lecture
de la
Bible.
traduite en langue -vulgaire. En 1539 les
évêques anglicans firent paraître "La Grande
Bible." Si fortes étaient les dépenses d'impres-
sion et si ardent le désir du peuple de lire les
Ecritures Saintes, qu'on dut attacher par une
chaîne la " Grande Bible" au mur des églises où
chacun pouvait venir la consulter à son tour.
On ordonna encore à chaque prêtre de se procurer
une Grande Bible, la plus grande qui fut impri-
mée, et de la placer dans l'endroit le plus
accessible de l'église et de donner ainsi à tous les
paroissiens facilité de la lire ou de l'entendre lire,
et d'être à même d'en méditer les enseignements
à leur retour au foyer. En 1543 le clergé reçut
l'ordre de la convocation de lire à chaque service
le dimanche et les jours de fête une leçon tirée
de l'Ancien Testament et une leçon tirée du
Nouveau. Aussi longtemps que la langue anglaise
sera parlée dans ce pays, les chrétiens, de quelque
dénomination que ce soit, seront redevables à
l'Eglise anglicane de ces dons si précieux.
70
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
CONCLUSION.
L'Eglise anglicane c'est donc bien l'Eglise
qui remonte véritablement au temps des Apôtres
et dont les premiers missionnaires sont venus des
pays de nos ancêtres, la Gaule. Cette Eglise a
donné au monde une liturgie incomparable, et
elle embrasse dans toute sa plénitude la foi de la
chrétienté unie. L'Eglise anglicane maintient la
foi et son ancienne empreinte sans rien y ajouter
de nouveau comme, par exemple, la croyance à
l'Immaculée Conception ou à l'infaillibilité du
pape. L'Eglise anglicane encourage les fidèles à
se servir de leur intelligence aussi bien que de leur
foi ; elle ne mutile pas le sacrement de l'amour du
Sauveur, et elle ne nie pas dans la pratique
l'efficacité de la médiation de Jésus-Christ et
l'abondance de sa sympathie. L'Eglise anglicane
ne fait pas commerce de reliques. En somme,
l'Eglise anglicane adore Dieu en Christ seul ;
elle ne décerne à aucune créature l'honneur r
exclusivement dû à ce grand Maître, et elle déclare
dansle Vlième article de Religion "Oue l'Ecriture
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
Sainte contient tout ce qui est nécessaire pour le
salut, de sorte qu'on ne doit pas exiger d'un homme
qu'il croie comme article de foi, ou qu'il considère
comme essentiel ou nécessaire au salut, la moindre
chose de ce qui ne s'}' lit pas, ou qui ne peut pas
se prouver par elle."
Sans vouloir entrer dans de trop minutieux
détails, nous allons poser en peu de mots ce en
quoi les Catholiques anglicans, eu matière de foi,
diffèrent essentiellement des Catholiques romains.
Ces derniers soutiennent
L Que le pape a reçu de Dieu l'autorité de
gouverner toute l'église ; qu'il e.-.t le juge suprême
de tous les fidèles, évêque par dessus tous les
évêques, et infaillible en matière de foi et de
morale ;
IL Que la Bienheureuse Vierge Marie et
les autres saints doivent être invoqués ;
IIL Que les images doivent être honorées
en mémoire des personnes qu'elles représentent ;
I\'. Que la sainte A'ierge est le fruit d'une
conception immaculée ;
V. Que la communion ne doit pas être
administrée sous les deux espèces aux laïques.
On admettra facilement qu'une Kglise qui
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
rejette toutes ces pratiques ne saurait être en
communion avec l'Eglise de Rome.
L'Eglise anglicane diffère encore de l'Eglise
romaine en ce qu'elle ne reconnaît que deux
sacrements de l'Evangile institués par Jésus-Christ.
Elle ne croit pas non plus au purgatoire et déclare
non scripturaire le sacrifice delà messe, puisqu'on
ne peut offrir d'autre sacrifice pour le péché que
celui qui a été offert sur la croix. Elle rejette
aussi la Transubstantiation et les indulgences.
" La prétention," disait, il y a près de
30 ans, un gran 1 auteur Anglais, " que l'Eglise
romaine (symbole de Pie IV,) est la mère et la
maîtresse de toutes les Eglises emporte avec elle
sa propre réfutation, car la mère ne peut être la
même que les filles. S'il y a d'autres Eglises i^^ EgH^e
auxquelles Rome a donné naissance, Rome ne romaine
1 1 -r- 1- ^ 11 ' 11' est pas
peut être la seule Kgli.^e : et comme elle n a pas lamere
le privilège d'être la plus ancienne, sa prétention des
d'être la mère de toutes les Eglises est fausse. ^^
Le Nouveau Testament nous dit clairement
(Actes 1-4, 11-41-47) que l'Eglise de Jérusalem
fut la première établie et organisée ; que la
seconde fut celle de Samarie (Actes, VIII-14 j,
et que la première Eglise des Gentils fut celle
d'Antioche\ Actes XI-20). C'est delà quel'Evan-
73
L'EGLISE ANGLICANE AVANT LA REFORME.
gile fut apporté pour la première fois à Rome
bien des années plus tard ; et comme les Eglises
de Jérusalem et d'Antioche existent encore, il est
clair que si Rome ne peut être identique à ses
propres filles, elle ne peut encore moins être sa
propre mère. .. .D'après la tradition romaine^
St. Pierre vint d'Antioche à Rome, et Antioche,
à n'en pas douter, reçut directement l'Evangile
de Jérusalem."
Et comme c'est l'Eglise anglicane qui, à
travers les étapes du Christianisme, est restée
ferme et inébranlable dans la foi primitive, et a
fourni les plus puissants adversaires contre les
erreurs et les prétentions de l'Eglise de Rome,
c'est donc à juste titre que nous l'appelons le
pilier de la foi et l'Eglise vraiment Catholique.
FIN
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£^/^jL..£ê^/fl^$
L'ARCHEVEQUE PARKER,
U aptes un ancien portrait au Palais Lanibeth.
BR Benoit, Henry E
7^6 L'église anglicane
B5^ avant la Heiorme
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